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Photo du rédacteurIrène de Palacio

A Lunéville, le monument Charles Guérin souffre de l'oubli


Imagines lambunt hederae.

PERSE.


La vieille volupté de rêver à la mort

A l'entour de la mare endort l'âme des choses.

STUART MERRILL.



Monument commémoratif du poète Charles Guérin

Jardin du Château Stanislas dit "les Bosquets", Lunéville.

Photo : collection personnelle.



Le monument donne l'impression d'être si détérioré que l'on peine, de loin, à distinguer ce qui l’orne. A son inauguration en 1909, il fit pourtant la fierté des Lunévillois ; mais les effets du Temps sont impitoyables, et Charles Guérin (1873-1907), l'homme intérieur, le doux disciple de Rodenbach, est désormais figé dans un bloc de calcaire noirci que le passant d'aujourd'hui contournera probablement sans un regard. Consolons-nous ; les plus attentifs aux murmures du passé, recueillis devant ce beau visage de poète, pourront toujours réciter les vers de "Choses mortes", du recueil de jeunesse Fleurs de Neige d'Heirclas Rügen (bel anagramme de Guérin), paru en 1893.



Depuis longtemps déjà les choses se sont tues

Dans ce parc. Le jet d'eau ne pleure même plus ;

La mousse âpre s'agriffe aux Neptunes velus

Et le lierre aux torses lisses des statues.



Photo : collection personnelle.


L'herbe frissonne au seuil des portes abattues,

La pluie, aux creux laissés par des pas inconnus,

Reflète un peu d'azur du ciel ; les tilleuls nus

Font glisser dans l'étang leurs racines tortues. —



Photo : collection personnelle.


Quand à l'automne les feuilles tombent à l'eau,

D'une ride légère elles troublent le flot

Puis sombrent lentement ; et la ride s'efface.


Mon âme est comme cette mare et mes amours

Dans l'oubli qui séjourne et dort sous la surface

A la fin d'un été s'enfoncent pour toujours.


3 septembre 1891.



Photo : collection personnelle.

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