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Photo du rédacteurIrène de Palacio

La Déplanétisation – Malcolm de Chazal

Pourquoi serais-je de cette planète, me suis-je dit, puisque je ne pense pas comme les autres ?

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La Déplanétisation

[Extraits]

Malcolm de Chazal (1902-1981), texte publié dans Demi-confidences (ed. Allia, août 2024)


Pourquoi serais-je de cette planète, me suis-je dit, puisque je ne pense pas comme les autres ?

Puisque, sorti de mon clan, n'appartenant plus à l'île où je vivais, n'ayant plus de contacts réels avec quiconque, n'étais-je pas devenu une planète par moi-même ? Je devais excéder mon monde, c'est pourquoi j'ai écrit. Qu'on me comprit ou non ça n'avait aucune importance. L'essentiel était de me dire, comme le pêcher donne ses pêches. Donc, je fructifiais. Si on m'avait compris, je n'aurais pas fait tout cela.

Ainsi, je réalisai combien ma solitude était créatrice. D'autres l'ont dit. Mais moi, je vivais mes livres. Ainsi, mes livres, c'était moi.

Aussi, je ne me relis jamais. Pour qui faire route en arrière ? Pour aller où ?


[...]


Le présent que je vis est abrupt, c'est pourquoi je suis impatient. Quand on me parle d'avenir, je trouve cela abstrait. Je ne voulais être en porte-à-faux sur la vie, mais dans la vie.

J'ai eu un grand défaut : coupé des autres, j'essayais de créer un pont entre moi et les autres. Je ne fais plus cela. Je regarde les autres comme d'un autre monde. C'est ça, la déplanétisation. Ça a un certain charme, comme de passer devant des rives sans s'arrêter. On me voit passer. Beaucoup en rient. On me croit ailleurs. Alors que c'est moi qui vois les autres comme ailleurs.

La vie, ainsi, est un exercice de l'Au-delà.


[...]


Cette vie-ci est un exercice de l'autre vie.

[...]


Cette vie-ci, m'a toujours paru un méli-mélo de gens diamétralement différents et qui doivent vivre ensemble.

Moi, j'étais d'une autre planète et je le deviens de plus en plus.




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