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George Sand et la botanique

Dernière mise à jour : 8 mai 2023


Portrait de George Sand





Lettres d’un Voyageur à propos de Botanique



"Vous me disiez : J’aime les fleurs avec passion, j’en jouis plus que vous qui cherchez la rareté, et trouvez sans intérêt les bouquets que je cueille pour vous tout le long de la promenade.


D’abord un aveu. Vous me saignez le cœur quand vous dévastez avec votre charmante fille une prairie émaillée pour faire une botte d’anémones de toutes nuances qui se flétrit dans nos mains au bout d’un instant. Non, cette fleur cueillie n’a plus d’intérêt pour moi, c’est un cadavre qui perd son attitude, sa grâce, son milieu. Pour vous deux, jeunes et belles, la fleur est l’ornement de la femme ; posée sur vos genoux, elle ajoute un ton heureux à votre ensemble ; mêlée à votre chevelure, elle ajoute à votre beauté : c’est vrai, c’est légitime, c’est agréable à voir ; mais ni votre toilette ni votre beauté n’ajoutent rien à la beauté et à la toilette de la fleur, et si vous l’aimiez pour elle-même, vous sentiriez qu’elle est l’ornement de la terre, et que là où elle est dans la splendeur vraie, c’est quand elle se dresse élégante au sein de son feuillage, ou quand elle se penche gracieusement sur son gazon.


Vous ne voyez en elle que la face colorée qui étincelle dans la verdure, vous marchez avec une profonde indifférence sur une foule de petites merveilles qui sont plus parfaites de port, de feuillage et d’organisme ingénieusement agencé que vos préférées plus voyantes. Ne disons pas de mal de ces princesses qui vous attirent, elles sont séduisantes : raison de plus pour les laisser accomplir leur royale destinée dans le sol et la mousse qui leur ont donné naissance."


(...)


"Le goût des fleurs s’est tellement répandu qu’il s’en fait une consommation inouïe en réponse à une production artificielle énorme. La plante est entrée, comme l’animal, dans l’économie sociale et domestique. Elle s’y est transformée comme lui, elle est devenue monstre ou merveille au gré de nos besoins ou de nos fantaisies. Elle y prend des habitudes de docilité et, si l’on peut dire ainsi, de servilité qui établissent entre elle et sa nature primitive un véritable divorce.


Je ne m’intéresse pas moralement au chou pommé et aux citrouilles ventrues que l’on égorge et que l’on mange. Ces esclaves ont engraissé à notre service et pour notre usage. Les fleurs de nos serres ont consenti à vivre en captivité pour nous plaire, pour orner nos demeures et réjouir nos yeux. Elles paraissent fières de leur sort, vaines de nos hommages et avides de nos soins. Nous ne remarquons guère celles qui protestent et dégénèrent. Celles-ci, les indépendantes qui ne se plient pas à nos exigences, sont celles justement qui m’intéressent et que j’appellerais volontiers les libres, les vrais et dignes enfants de la nature.


Leur révolte est encore chose utile à l’homme. Elle le stimule et le force à étudier les propriétés du sol, les influences atmosphériques et toutes les conséquences du milieu où la vie prend certaines formes pour creuset de son activité. Les droséracées, les parnassées, les pinguicules, les lobélies de nos terrains tourbeux ne sont pas faciles à acclimater. La valisnérie n’accomplit pas ses étranges évolutions matrimoniales dans toutes les eaux. Le chardon laiteux n’installe pas où bon nous semble sa magnifique feuille ornementale ; les orchidées de nos bois s’étiolent dans nos parterres, l’Orckis militaris voyage mystérieusement pour aller retrouver son ombrage, l’ornithogale ombelle descend de la plate-bande et s’en va fleurir dans le gazon de la bordure, la mignonne véronique Didyma, qui veut fleurir en toute saison, grimpe sur les murs exposés au soleil et se fait pariétaire."



Revue des Deux Mondes, 2e période, tome 75, 1868



 


George Sand en son jardin de Nohant




Dessin par Maurice Sand




Lettre adressée à Eugène Delacroix après son deuxième séjour à Nohant, écrite à Nohant le 4 novembre 1843


«… je sème, je plante, je fume mes plates-bandes, je fais des massifs, j’enfonce des pieux, je relève des murs, je fais venir de la terre légère d’une demie-lieue. Je suis en sabots toute la journée et ne rentre que pour dîner. Je ne plante pas un brin d’herbe sans penser à vous, sans me rappeler comme vous aimez et appréciez les fleurs, et comme vous les sentez, et comme vous les comprenez, et comme vous les peignez…
J’ai fait multiplier dans mon jardin le mérite modeste (le réséda dans le langage des fleurs), la mauve jaune pâle à cœur violet et à étamines d’or. Elle a conservé le nom que vous lui avez donné… »



Nohant, le potager vers 1900




« … Je vis plongée dans le travail de la campagne. Je fais faire un manège, une serre, un atelier, les vendanges, une noce… Je ne rentre à la maison que pour dîner, et je vis tellement au grand air que je ne sais plus comment je pourrai exister dans ma cage à Paris… »

Lettre adressée à une amie parisienne, écrite à Nohant en novembre 1845




A Maxime Du Camp, lettre écrite à Nohant, le 5 avril 1859

« J’ai lu ce matin Le Chevalier au cœur saignant dans ma petite serre, au bruit d’un petit jet d’eau qui effeuillait un beau camélia blanc. Le soleil étincelait sur la mousse verte et sur une azalée rouge qui me crevait les yeux… ».



La serre de Nohant 1875, photographie signée Verdot.

(Lina Sand, debout, Gabrielle et Aurore)




« Dis à Pierre (le jardinier du moment) de semer sur couche et sur plates-bandes les graines de fleurs qui sont dans un des grands vases de Chine, dans ma chambre à coucher… et qu’il les soigne car je veux des fleurs en quantité toute l’année, autour de la maison… ».

Lettre écrite à Paris le 4 mars 1842, adressée à Hippolyte Chatiron, son demi-frère





Nohant, jardin




Lettre écrite à Nohant le 26 mai 1846, à Charles Veyret, fournisseur attitré en fleurs de George Sand :


« Vous m’avez promis aussi des greffes de roses. J’en ai déjà pas mal de très belles, mais vous devez avoir bien mieux. Ce que j’ai de plus beau, c’est une rose, rose vif, énorme, vigoureuse en feuillage, qu’on appelle je ne sais comment (dommage pour nous…) ; une rouge sur laquelle j’ai compté 310 pétales l’année dernière ; une thé safranée ; une autre thé blanche à cœur vert jaunâtre ; et enfin une thé couleur de chair rosée. Si vous avez autre chose, faite m’en part… »



Nohant, jardin




Lettre écrite à Nohant le 10 décembre 1873, adressée à Alphonse Karr :


« Depuis hier je pense à la rose et je ne me rappelle pas lui avoir rendu l’hommage qu’elle mérite et qui sera meilleur que tous les autres venant de vous. J’adore les roses, ce sont les filles de Dieu et de l’homme, des beautés champêtres délicieuses dont nous avons su faire des princesses incomparables ; et pour nous en remercier, elles sont ardentes à la floraison. En plein décembre, dans mon jardin, qui est loin d’être sous un beau ciel, tous les matins j’en trouve de superbes qui s’ouvrent sans souci de la gelée blanche et qui se font d’autant plus aimer qu’elles ont survécu à presque toutes les fleurs en pleine terre.


Ma favorite à moi, est une rose modeste, d’un blanc rosé, à feuilles de pimprenelle. Je la vois rarement dans les jardins et jamais sur les catalogues. Elle n’est plus à la mode, et puis elle est si épineuse qu’on a de la peine à la cueillir. C’est elle qui a le ton le plus fin et le parfum le plus délicat. Après elle, vient pour moi la rose-thé blanche à cœur verdâtre. Celle-ci ne sent que le thé, mais elle brave la gelée à glace, et j’ai une grande reconnaissance pour ces courageuses beautés qui charment généreusement nos tristes hivers de France…»




Nohant, jardin




George Sand à son cousin René Vallet de Villeneuve, propriétaire du château de Chenonceaux, lettre écrite à Nohant, le 2 août 1847 :


« Les beaux fuchsias de Chenonceaux sont fleuris sur ma terrasse et se portent bien, ainsi que les autres plantes. Je pense à Chenonceaux en le voyant… »



Nohant, les fuchsias dans le vase Médicis, devant les deux Cèdres du Liban





En 1872, elle écrit à Flaubert :

« Ce que j’aimerais, ce serait de me livrer absolument à la botanique, ce serait pour moi le paradis sur la terre ».


Page d'herbier de George Sand




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